«  Pour les pouvoirs publics, décarboner se résume à électrifier les usages thermiques du bâtiment sans même chercher à réduire les besoins ». Dans une lettre au Premier ministre, 18 organisations dont Négawatt, Coénove, le CIBE, Flame, l’AFPG ou encore Energies et Avenir, soulignent que les dispositions qui visent à modifier le contenu carbone du kWh chauffage et le coefficient d’énergie primaire relatifs à l’électricité, à exprimer le DPE en énergie finale et à placer le label BBC à 60 kWhEF/m²/an sont « pour certaines non conformes aux directives européennes, contraires aux lois de la physique et contreproductives au regard des objectifs de la stratégie nationale bas carbone ».

Ils considèrent que la réforme prévue, impactant la réglementation environnementale (RE2020), le DPE et le label BBC « va déstructurer le secteur énergétique, maintenir une piètre qualité des enveloppes bâties, contraindre les maîtres d’ouvrage à des choix de court terme peu efficaces et peu pertinents, accroître le nombre de ménages en précarité énergétique en renchérissant la facture de chauffage ».

Pour ces derniers, il apparaît que :

 - "Le seuil du label BBC, objectif du parc, baisse d’un tiers pour les combustibles, de deux tiers pour le bois, mais augmente d’un facteur 3 pour l’électricité, éliminant ainsi le bois, voire tous les autres combustibles, par des travaux de rénovation rendus plus chers que dans les logements chauffés par effet Joule".


- " Les incertitudes du futur supposent une faculté d’adaptation qu’interdira l’irréversibilité du choix de l’effet Joule et qu’à l’inverse, la distribution d’eau chaude permettrait ".


- " Pratiquement tous les propriétaires rénoveront en adoptant l’effet Joule en raison de coûts de travaux et de contraintes réglementaires plus faibles que pour toute autre solution. Passer de convecteurs aux granulés devient impossible au regard des contraintes d’isolation imposées. Le bois est pourtant une chaleur renouvelable dont la Ministre de la Transition écologique et solidaire a déclaré le 3 avril 2020 qu’elle voulait en faire « un des vecteurs de la reprise économique » ".


- "En construction neuve et en rénovation, l’ambition de performance est abandonnée et laisse place à des passe-droits rendus peu légitimes par l’existence de pompes à chaleur très efficaces fonctionnant aussi bien au biogaz, à l’électricité ou de manière hybride. Une stratégie d’autant moins compréhensible que la stratégie nationale bas carbone elle-même avait abondamment recours aux pompes à chaleur. Cela va fragiliser la sécurité d’approvisionnement en 2030 en augmentant la pointe hivernale de 10 GWe et la consommation électrique de 22 TWh, alors que 14 réacteurs nucléaires seront en fin de vie d’ici 2035. L’électricité, déjà très carbonée en hiver, le sera davantage par la hausse des importations d’électricité à fort contenu carbone".


- " La nouvelle étiquette induira en erreur les usagers pour qui la croissance des classes énergétiques rime avec celle des coûts : désormais des logements de même classe auront la même consommation d’énergie finale mais des coûts de chauffage du simple au triple. Cette réforme aura pour effet visible l’explosion des factures de chauffage et l’accroissement de la précarité énergétique "


- "Ce nouvel étiquetage conduira, de manière inacceptable et sans faire de travaux, à sortir des classes F et G (devant être rénovées avant 2028) environ 3 millions de logements chauffés à l’électricité, et à y faire entrer environ 6 millions de logements chauffés par combustibles. Rénover ces logements chauffés par combustibles est une évidence, éviter la rénovation de ceux chauffés à l’électricité est incompréhensible et contraire à la directive européenne bâtiments ".