Bernard Aulagne, président de l'association Coénove – regroupant les industriels de la filière gaz et promouvant la complémentarité des énergies -, livre son sentiment sur les offres à 1 euro.

 " C’est peu de dire que la question du pouvoir d’achat exacerbe les prises de parole depuis quelques mois. Dernier exemple en date ayant suscité un emballement politico-médiatique : les offres de chaudières et de pompes à chaleur (PAC) à 1€. Lancées brutalement par voie de presse, relayées avantageusement dans la bouche du Ministre, elles ont immédiatement cristallisé les différents acteurs du secteur de la rénovation et reproduit les clivages nets dont notre pays ne semble pas pouvoir se passer : avant même de creuser la question, piqués par la sécheresse des annonces, deux camps se sont dressés : les pour et (surtout) les contre, sans véritablement savoir de quoi il retournait.Un rappel basique tout d’abord : le montant symbolique et percutant de 1€ n’est atteignable que si l’on cumule les aides de l’ANAH destinées aux ménages très modestes (prise en charge de 50% du montant des travaux) et les Certificats d’Economie d’énergie (CEE) également pour les très modestes, tels que publiés dans l’arrêté Coup de pouce du 10 janvier 2019, auxquels il convient de rajouter des ‘efforts de la filière’, en termes de maîtrise des marges.S’adressant aux ménages très modestes, ces offres à 1€ ne sont donc, et c’est déjà beaucoup, qu’une réponse de la filière chauffage à la question cruciale de la précarité énergétique et je me félicite que la filière gaz puisse apporter concrètement sa contribution à la lutte contre ce fléau, mais elles ne constituent qu’une réponse très minime à la massification de la rénovation énergétique.Elles ne sont en tout cas pas suffisantes pour couvrir l’ensemble des besoins estimés dans le ‘grand plan de renouvellement du parc de chauffage’ comme le nomme le Gouvernement : remplacement de 600 000 chaudières dans les 2 années à venir, voir 1 million d’ici 2023, parmi les équipements les plus vétustes, notamment au fioul. Pour y parvenir, il faudra toucher d’autres populations que les ménages très modestes. D’ailleurs, la médiatisation de ces offres a déjà suscité un fort engouement et des milliers de personnes ont contacté les porteurs de ces offres sans pouvoir pour autant en bénéficier. Afin de ne pas créer de déception et de frustration, il convient de compléter la gamme d’offres pour toucher le maximum de ménages en fonction de leurs attentes et d’augmenter le nombre de porteurs d’offres.Une installation de chauffage n’est pas un paquet de lessive ou un pot de Nutella … Il faut se garder de la tentation des promotions exceptionnelles chères à la grande distribution et garder avant tout à l’esprit l’indispensable qualité du produit, de sa mise en œuvre, mais aussi de la maintenance pour apporter à l’utilisateur toute la satisfaction qu’il est en droit d’attendre dans la durée, quelles que soient ses conditions de ressources. A trop mettre en avant le 1€, on risque d’attirer sur ce secteur aidé les éco-délinquants qui avaient proliféré dans les années 2008/2010 dans les domaines du photovoltaïque et de la pompe à chaleur, avec le cortège de contre-références et de consommateurs lésés que l’on a connu.Pour autant, pourquoi ne pas s’inspirer des points positifs ce type d’offres pour convaincre plus de ménages que « moderniser son installation de chauffage, c’est faisable ». Le regroupement de toutes les aides, la proposition d’une mensualité, incluant le contrat d’entretien, autant de pistes sur lesquelles se mobiliser. Certes, ces montages ne sont pas aisément à la portée de tel ou tel artisan, mais je fais confiance à leurs organisations professionnelles pour les aider à répondre à cette opportunité et aider les Français être mieux chez eux. Je sais qu’elles y travaillent déjà ". Bernard Aulagne, président de Coénove