

La RE2020 prend en compte l'impact sur le changement climatique des matériaux et équipements à travers une analyse du cycle de vie du bâtiment. Le calcul réglementaire fait appel à des données issues de déclarations environnementales des fabricants (FEDS ou PEP) ou à des données génériques par défaut plus pénalisantes.

La base nationale lnies regroupe l'ensemble des données environnementales qui peuvent concerner un produit ou un équipement particulier, ou encore une famille de matériaux ou un ensemble de produits. Sa consultation est gratuite.

Si, dans un premier temps, les seuils réglementaires restent atteignables sans bouleversement des modes constructifs actuels, le renforcement des exigences conduira à privilégier les matériaux et composants« bas carbone» ayant un plus faible impact environnemental.
En moyenne 60 à 90 % de l'empreinte carbone d'un bâtiment neuf performant est constituée par les matériaux de construction qui le composent. Les acteurs de la construction sont donc incités à utiliser des matériaux qui émettent peu de gaz à effet de serre pendant leur cycle de vie.
Lors des appels d'offres, certains maîtres d'ouvrage demanderont aux entreprises de fournir les données environnementales des produits ou des équipements mis en œuvre. Encore faut-il savoir où trouver ces informations et comment les utiliser.
RAPPEL DES EXIGENCES DE LA RE2020
La RE2020 s'intéresse à l'empreinte carbone de chaque nouvelle construction à travers une analyse de son cycle de vie (ACV). Cette analyse prend en compte l'ensemble des gaz à effet de serre émis tout au long de la vie du bâtiment, « du berceau à la tombe», c'est-à-dire depuis l'extraction des matières nécessaires à la fabrication des produits de construction et des équipements, en passant par la construction et la phase d'exploitation, jusqu'à la destruction en fin de vie du bâtiment et le traitement des déchets qui en découle, et ce sur une période de référence de cinquante ans. Pour chacune de ces phases du cycle de vie, le calcul prend en compte la contribution aux impacts environnementaux des cinq catégories qui composent le bâtiment: les émissions relatives aux composants (matériaux et équipements), aux énergies importées, à la phase chantier, aux consommations d'eau et à la parcelle. L'analyse du cycle de vie du bâtiment cumule ainsi l'impact de chaque élément rapporté aux quantités mises en œuvre et à la durée de vie conventionnelle selon le principe suivant:
Impact d'un élément = Quantité (volume, métré ... ) x Données environnementales x Taux de renouvellement
Les données environnementales sur lesquelles s'appuie la réglementation expriment l'impact par unité fonctionnelle. Selon la contribution calculée, cette unité fonctionnelle correspondra par exemple à des quantités de composants (unités, mètres carrés, millilitres ... ), d'énergie (kilowattheures d'énergie consommée) ou encore d'eau (mètres cubes). Ainsi, pour calculer le poids carbone de chaque composant du bâtiment (produits ou équipements), la réglementation s'appuie sur des données environnementales qui expriment la performance environnementale d'un produit en kilogrammes d'équivalent C02 par unité fonctionnelle. Concrètement, la RE2020 définit une série d'indicateurs environnementaux afin d'objectiver les impacts du bâtiment. L'indicateur lccanstructian, exprimé en kilogrammes d'équivalent C02 par mètre carré (kg eq.C0im'), évalue les émissions de gaz à effet de serre liées aux composants (produits et équipements) ainsi qu'à leur mise en œuvre lors du chantier rapportées à la surface de référence du bâtiment. Il est soumis à un seuil réglementaire qui sera renforcé d'environ 35 % (selon la typologie de bâtiment) entre 2022 et 2031, avec des jalons intermédiaires tous les trois ans (figure 1).
Ce seuil est modulé en fonction de la zone géographique, de la présence de combles, de la surface du bâtiment, mais aussi en fonction des infrastructures, de la voirie et réseaux divers (VRD) et du type de fiche de déclaration environnementale. Par exemple, en maison indivi-duel le, une modulation permet de ne pas pénaliser l'espace des combles aménagés lorsque la hauteur sous plafond est inférieure à 1,80 mètre.
LES DONNEES ENVIRONNEMENTALES
Avec la RE2020, l'évaluation réglementaire de la performance environnementale des bâtiments neufs nécessite l'emploi de données en-vironnementales pour la réalisation des analyses du cycle de vie et le calcul des indicateurs. Les données environnementales peuvent être issues des déclara-tians environnementales émises par les fabricants. Il en existe deux types : on parle de FDES (fiche de déclaration environnementale et sanitaire) pour les produits de construction et de PEP (profil en-vironnemental produit) pour les équipements électriques, électro-niques et de génie climatique. En l'absence de déclaration fournie par un fabricant ou un groupe de fabricants, il existe deux autres types de données utilisables : les données environnementales de service (ou forfaitaires) mises à dispositions par le ministre chargé de la construction et le ministre chargé de l'énergie, et les données environnementales par défaut Cap-pelées DED). Cependant, le recours à ces données génériques par dé-faut peut avoir une forte incidence sur le calcul, car les données par défaut sont généralement beau-coup plus sévères.
Pour éviter de pénaliser un projet, il est donc essentiel d'avoir le plus possible recours à des données spécifiques déclarées dans les FDES ou les PEP. Ces données peuvent être de deux types :
- des FDES ou PEP collectives : établies pour un ensemble de produits similaires par plusieurs fabricants.Ces données collectives permettent de mutualiser les coûts mais nécessitent d'avoir un cadre de validité pour savoir quels produits ou corn-posants sont concernés;
- des FDES ou PEP individuelles : établies pour un produit ou équipement en particulier, les données sont plus précises et permettent de valoriser une solution.
Un fabricant, plusieurs fabricants ou une organisation professionnelle représentant plusieurs fabricants peut fournir les informations uti-lisées pour le calcul de la per-formance environnementale des bâtiments, notamment afin de ne pas recourir à une donnée environ-nementale par défaut.
Il établit alors une déclaration environnementale dont le contenu fait l’objet d’une vérification par tierce partie indépendante. La conformité de la déclaration environnemen-tale est formalisée par la délivrance d’une attestation de vérification remise par la tierce partie indé-pendante au déclarant. Ces décla-rations (FDES ou PEP) sont alors intégrées dans une base unique : la base Inies.
LA BASE INIES
Les données environnementales nécessaires à l’évaluation environnementale dans le cadre de la RE2020 sont rassemblées dans la base de données Inies et sont consultables gratuitement sur www.inies.fr. Cette dernière est la base de données nationale de référence sur les données envi-ronnementales et sanitaires des produits et équipements de la construction. Elle met à disposition des données issues de déclarations environnementales (FDES ou PEP), de données environnementales par défaut (DED) ou de données envi-ronnementales conventionnelles forfaitaires.
Sur chaque FDES ou PEP, la performance environnementale concernant le réchauffement climatique s’exprime en kilogrammes d’équi-valent CO2 par unité fonctionnelle. L’unité fonctionnelle choisie dépend du type de produit.
Pour les tuiles, cela pourra être le mètre carré de couverture. Pour un équipement, l’unité pourra être l’appareil lui-même.
L’accès au catalogue en ligne de la base Inies permet de rechercher des données environnementales de trois manières :
- par famille : elle permet une recherche par typologie de produits de construction, d'équipements ou de services ;
- par organisme déclarant : elle donne une visibilité de l'ensemble des déclarations d'un déclarant ;
- dernièrement créées/modifiées : elle permet aux utilisateurs réguliers d'identifier rapidement les déclarations récemment mises en ligne.
La fonctionnalité « Recherche d'un produit » permet des recherches multicritères sur le nom d'un produit, le nom du déclarant, des mots clés, une famille de produit, le type de déclaration (individuelle, collective, par défaut ou conventionnelle) ou encore la performance principale par unité fonctionnelle.
COMMENT LIRE UNE FDES OU UNE PEP ?
Les FDES (figure 2) et PEP sont des mines d'informations qui regroupent:
- des informations générales comprenant le nom du produit et sa famille, les coordonnées du déclarant, le type de déclaration (individuelle ou collective), le nom du vérificateur ou encore les dates de déclaration et de mise à jour des données;
- l'unité fonctionnelle et la durée de vie de référence : l'unité fonctionnelle peut être, selon le type de produit, une quantité, une masse, un volume, une surface ;
- les indicateurs environnementaux normalisés (ou profil environnemental) qui servent de base aux calculs avec la description des étapes du cycle de vie et les résultats de l'analyse (impacts environnementaux, utilisation des ressources, catégories de déchets, flux sortants) ;
- des informations additionnelles sur la santé et le relargage des substances dangereuses (seulement pour les FDES) concernant la pollution de l'air intérieur, du sol ou de l'eau;
- la contribution du produit à la qualité de vie à l'intérieur des bâtiments (seulement pour les FDES) : ces données peuvent impacter le confort hygrothermique, acoustique, visuel, olfactif. Attention, pour comparer les performances de deux produits, il faut qu'ils aient la même unité fonctionnelle et la même durée de vie conventionnelle de référence. À titre d'exemple, on peut trouver sur la base lnies trois fiches comportant des données environnementales pour les petits éléments de couverture en terre cuite : deux FDES collectives émanant du CTMNC et une fiche de données par défaut. L'unité fonctionnelle pour ces trois fiches est définie comme permettant d'assurer « /a fonction de couverture de 1 m2 de toiture en petits éléments en terre cuite pour une durée de vie de référence de 100 ans»

Figure 2 : Informations dans les FDES
Les valeurs de la base lnies à prendre en compte pour le calcul de l'impact environnemental de1 m2 de couverture varient selon la source retenue :
- donnée par défaut pour les tuiles en terre cuite : 28,6 kg d'équivalent C02;
- FDES collective pour les tuiles canal et tuiles plates de terre cuite : 23,1 kg d'équivalent C02 ;
- FDES collective pour les tuiles de terre cuite à emboîtement: 14,8 kg d'équivalent C02.
Si les données par défaut concernent l'ensemble de la famille des tuiles en terre cuite, on voit bien qu'il est plus intéressant de se fonder sur des produits rentrant dans le champ des FDES.
QUELLES CONSEQUENCES DANS LE CHOIX DES PRODUITS ET EQUIPEMENTS ?
Durant la première phase (2022-2025), les seuils réglementaires pour les produits de construction et les équipements (de chauffage, de climatisation, de ventilation .. .) sont atteignables sans bouleversement des modes constructifs actuels. L'enjeu essentiel porte sur l'appropriation par l'ensemble des acteurs de la comptabilisation du poids carbone d'une construction pour qu'à terme, les données environnementales soient fiables et facilement accessibles.
À partir de 2025, les exigences augmenteront par paliers (2025, 2028 et 2031) et conduiront à : utiliser des matériaux bas carbone : un effort des filières industrielles est indispensable pour que de plus en plus de matériaux dits « bas carbone» soient mis sur le marché. L'utilisation de matériaux biosourcés est dans bien des cas une réponse adaptée pour faire baisser le poids carbone d'un bâtiment, même si toutes les filières (y compris les filières minérales) devraient trouver leur place dans la RE2020. Des solutions telles que les constructions mixtes (bois-béton, bois-acier ... ) ou encore les produits recyclés ou issus du réemploi sont aussi des leviers qui pourraient s'avérer pertinents ;
- utiliser des matériaux plus durables : l'analyse de cycle de vie du bâtiment étant réalisée sur une période de référence de cinquante ans, le choix de produits durables est un atout important pour améliorer la performance environnementale d'un projet, afin que le taux de renouvellement d'un produit (pris en compte dans le calcul) soit le plus faible possible ;
- construire des bâtiments frugaux : la réduction du poids carbone d'un projet passe aussi par la réduction des quantités de matière (ex. : bâtiments plus compacts, optimisation de l'épaisseur des murs, etc.). Mais cette optimisation doit se faire dans le respect de l'ensemble des autres contraintes techniques et réglementaires qui pèsent déjà sur le bâtiment.
Article extrait d'Eau et confort 09 - Mars 2022
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