Comment faire d’un vieux bâtiment en tôle des 70’s, véritable épave thermique, un totem de la performance énergétique ? C’est le pari un peu fou qu’a voulu relever la structure de conseil et maîtrise d’oeuvre Diagonale Concept en acceptant de transformer des locaux dont personne ne voulait en périphérie lyonnaise en un Bepos de 854 m². Ingrédient principal de cette cure d’énergie positive : stockage dans le granite souterrain de l’énergie solaire produite l’été.

Marc Campési, maître d’oeuvre du projet, et dirigeant de Diagonale Concept, est un professionnel engagé pour la performance énergétique des bâtiments, d’autant plus en rénovation, un marché qui ne bouge pas assez vite selon lui. Alors quand Pierre Martin, dirigeant de la branche française de l’équipementier KTR, lui fait part de son envie de transformer un vieux bâtiment en tôle des années 70 implanté à Dardilly, en région lyonnaise, pour en faire son nouveau siège, Marc Campési y voit l’occasion de faire de ce bâtiment un totem de la rénovation énergétique. « La priorité était que ce bâtiment soit à énergie positive, tout usage confondu, explique le maître d’oeuvre. Sauf que rendre une caisse en tôle très performante est assez complexe. Bien que nous ayons isolé les murs avec du chanvre, il faut aller chercher de l’énergie gratuite pour compenser les déperditions d’énergie du bâtiment. Heureusement, nous avons deux amis généreux, le soleil et la terre ! ».

La chaleur gravée dans la roche

Marc Campési décide alors de les faire communiquer, en récupérant les calories lors de pics de chaleur en été, et en les stockant dans le sol pour les restituer en hiver, « à l’image des écureuils avec leurs noisettes » plaisante le maître d’oeuvre. Le BE suisse Amstein-Walthert propose alors d'installer sur le toit du bâtiment 40 m² de panneaux solaires hybrides, fabriqués par la PME française DualSun, pour assurer la production d’électricité, dont une partie est réinjectée dans le réseau et l’autre consommée sur place pour alimenter une pompe à chaleur, ellemême reliée à un plancher chauffant et à une centrale de traitement d’air. Les panneaux solaires produisent également de l’eau chaude, dont des calories sont stockées en été et en intersaison dans la roche à plus de 150 m de profondeur grâce à quatre sondes géothermiques de Terrendis de 32 cm de diamètre. « Nous avons dû dimensionner les sondes et les panneaux pour stocker les calories suffisantes au fonctionnement du système en hiver via la pompe à chaleur » détaille Marc Campési. Ici, pas d’échange thermique à travers la nappe phréatique, mais bien entre les sondes et le granit. « Sa capacité de stockage est meilleure que celle de l’eau » se justifie le maître d’oeuvre. La chaleur transmise par les sondes fait alors monter de 3 °C la température du granit, suffisants selon le maître d’oeuvre pour stocker toutes les calories nécessaires à une saison de chauffe, tout en évitant la fracturation hydraulique de la roche. « En France, les sous-sols sont sous-exploités, constate Marc Campési, alors que la géothermie permet de concevoir des systèmes pérennes, avec un impact écologique bas ! La géothermie permet de profiter d’une source de chaleur à température positive, même au coeur de l’hiver. » L’autre avantage de cette combinaison est le maintien d’une température du sol de 13 à 17 °C, ce qui garantit une performance optimale de la pompe à chaleur toute l’année et l’utilisation des sondes uniquement avec de l’eau, sans antigel.

Climatisation naturelle

Si, en hiver, le chauffage est donc assuré par ce stockage de calories, en été, pour rafraîchir le bâtiment, l’eau stockée dans la roche, et donc à une température moins élevée que celle dans le bâtiment, va circuler dans les planchers et absorber les calories à l’intérieur du bâtiment pour les réinjecter dans la roche, à 150 m de profondeur, toujours via la PAC. Le dispositif a largement pu être vérifié cet été, lors de la canicule de fin juin, où la température à l’intérieur des locaux restait à 23 °C alors que le thermomètre grimpait au-delà de 40 °C à l’extérieur. « On climatise sans énergie ! » s’extasie Marc Campési. Précisons, tout de même, que la centrale de traitement d’air, couplée à la pompe à chaleur, complète le système en apportant un mouvement d’air frais. Le bâtiment dispose également de capteurs d’hygrométrie, pour alerter les occupants et déclencher la ventilation passive.

Bilan énergétique positif

Cette combinaison de stockage d’énergie solaire et de sondes géothermiques, inédite dans le tertiaire en France, semble être une réussite, puisqu’elle permet au bâtiment de produire presque deux fois plus d’énergie qu’il n’en consomme. « Après 18 mois de fonctionnement, on va atteindre une production de 38,5 MWh dont 5,6 MWh en autoconsommation, alors que la consommation pour les cinq usages réglementaires de la RT2012 est de 26 MWh » se réjouit Marc Campési. Et même s’il ajoute au calcul les autres usages électriques, à savoir la bureautique et la recharge de véhicules sur le site, le maître d’oeuvre se retrouve avec un bilan presque à l'équilibre avec 42 MWh de consommation électrique, et une température de confort à 23 °C en hiver et en plein été. Un gain de performance de 7 à 10 % est prévue l'année prochaine, après un paramétrage final des installations, notamment sur la température intérieure en saison de chauffe. Marc Campési et son équipe d’ingénierie espèrent maintenant que ce « démonstrateur » fasse des émules.

FICHE TECHNIQUE

Rhône (69) Dardilly

Équipements

Sondes et PAC géothermiques, panneaux solaires hybrides, plancher réversible multibéton, CTA

Poste couverts

Chauffage, rafraîchissement et ECS de locaux tertiaires de 854 m²

Exploitation

Depuis fin 2018 Acteurs

Maître d'oeuvre :

Diagonale Concept

• Maître d'oeuvre :

Bureau d'études :

Amstein-Walthert (Suisse)

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