Olivier Sidler, fondateur du bureau d'études Enertech, a profité d'une conférence de l'association Négawatt dont il est porte-parole pour réagir suite aux annonces très électriques du gouvernement, notamment le changement du calcul du DPE, prenant en compte non plus l'énergie primaire, mais l'énergie finale.



L'association Négawatt, créée en 2000 et réunissant près de 1 200 professionnels de l'énergie, a voulu sonner l'alarme suite à une "accumulation" de mesures gouvernementales favorisant l'électricité au détriment d'autres énergies, dans le bâtiment mais également dans la mobilité, et d'une manière plus générale sur la trajectoire du mix énergétique en France. "Nous avancions à petits pas, maintenant nous avons enclenché la marche arrière !" s'inquiète Olivier Sidler, porte-parole de Négawatt.

2Mds € / an pour un PTZ accessible à tous

Selon le thermicien, pour respecter la SNBC, à savoir une neutralité carbone en 2050, "il faudrait rénover à partir de cette année 540 000 logements par an. En 2018, meilleure année jusqu'à maintenant, seulement 30 000 ont été rénovés en France. L'incitation ne suffit pas, il faut obliger à rénover, et donner les moyens financiers !" Dans son scénario pour réussir la transition énergétique, Négawatt propose que cette obligation soit mise en oeuvre "exclusivement à travers des rénovations très performantes effectuées en une seule fois, plutôt que par étapes étalées dans le temps". Selon l'association, en consacrant 2 milliards d'euros par an au financement d'un prêt à taux zéro "accessible sans exception à l'ensemble des ménages", l'Etat permettrait de rénover 700 000 logements par an.

Pour une électricité intelligente grâce à la PAC

Olivier Sidler s'est également insurgé contre l'abaissement prévu du coefficient d'énergie primaire et l'impact carbone de l'électricité dans la RE2020, qui signent, selon lui, le retour des grille-pains pour se chauffer. "Quel est le maître d’ouvrage qui choisirait autre chose que des convecteurs électriques alors que l’investissement est plus faible que n'importe quel autre équipement et qu'il rentre dans les clous de la réglementation ?" Selon le porte-parole de Négawatt, "l'électricité n'a pas besoin de bidouilles pour permettre un chauffage performant dans les logements." Olivier Sidler fait notamment référence aux pompes à chaleur qui, selon lui, sont des solutions électriques intelligentes et éviteraient de désorganiser le marché par "des passe-droits illégitimes."

L'ingénieur a également dénoncé la modification du calcul du DPE, passant d'énergie primaire à énergie finale. "C'est une entorse aux directives européennes, et une tromperie vis-à-vis des particuliers, car l'électricité vaudrait donc subitement 2,5 fois moins que n'importe quelle autre solution de chauffage." En effet, avec ce changement, des logements chauffés à l'électricité et actuellement classés D pourraient passer dans la catégorie B, et d'autres chauffés au gaz et notés actuellement B pourraient basculer dans la catégorie D. Olivier Sidler craint que les ménages ne fassent le choix du chauffage électrique lors de travaux de rénovation, au risque de voir leur facture s'envoler, le kWh électrique étant le plus cher. "Cette stratégie coûtera très cher aux particuliers et elle ne changera pas le fond du problème !" Reste à voir si l'alarme de Négawatt retentira jusque dans les bureaux ministériels, où les décisions semblent déjà être actées...